Le président d'Airbus Helicopters souligne l'importance, pour l'avenir de l'entreprise, de sécuriser le programme du nouvel hélicoptère interarmées léger et explique pourquoi c'est important pour Airbus d'accélérer le programme. Il évoque un potentiel à l'exportation de 400 appareils.

De Safran à Airbus Helicopters, quelles sont vos premières impressions ?

C'est évidemment un changement dans la continuité, puisque je connais bien le marché des hélicoptères. Mais c'est très stimulant de faire partie de  la nouvelle équipe de management d'Airbus . Notre industrie est à un tournant en termes de compétitivité, de qualité, de diversité. La nouvelle ligne d'assemblage de notre nouvel hélicoptère H160 représente par exemple une division par deux de la durée du cycle de production par rapport à la production actuelle.

Les commandes militaires ont regarni votre carnet de commandes en 2018, est-ce une tendance de fond ?

En 2018, c'est vrai, nous avons obtenu un très bon niveau de prises de commandes de 413 appareils, grâce à  quelques contrats militaires significatifs , ce qui nous a permis de rentrer plus de commandes que nos livraisons. La tendance devrait se confirmer cette année, mais sur un marché cyclique, l'idée pour Airbus Helicopters est de maintenir quatre sources de diversification pour résister aux à coups conjoncturels : faire des hélicoptères à double usage civil et militaire, équilibrer les activités de ventes et de services, être présent sur tous les continents et avoir la gamme d'appareils la plus large de tous les hélicoptéristes.

Une compétition importante se joue en ce moment aux Etats-Unis. Avez-vous une chance de la gagner dans un contexte de protectionnisme grimpant ?

Nous avons répondu à un appel d'offres de l'US Navy pour une centaine d'hélicoptères d'entraînement, sur la base de nos H135, qui ont déjà été retenus par les forces allemandes, japonaises, britanniques et australiennes pour former leurs pilotes. Notre offre est crédible, d'autant que nous avons une usine d'assemblage aux Etats-Unis à Columbus dans le Mississipi. Elle a déjà produit plus de 450 hélicoptères Lakota de type H145 à l'US Army, un programme qui se déroule sans accroc. Donc nous pensons avoir nos chances. Cette compétition majeure doit se dénouer avant la fin de l'année.

D'autres campagnes pourraient déboucher en 2019, par exemple en Indonésie qui s'apprête à commander une deuxième tranche pour des H225M (Caracal). La Roumanie a aussi besoin de renouveler sa flotte mais le dossier est soumis à de fortes pressions des Etats-Unis. D'ores et déjà, nous avons obtenu la confirmation en début d'année par l'Espagne de sa commande de 23 NH90 et par la Hongrie de 16 H225M.

La  , qui exige une remise à plat des procédures d'entretien. Où en est-on ?

Nous travaillons de manière continue sur l'amélioration de la performance des appareils et sur l'optimisation des activités de maintenance. Par exemple, le NH90 Caïman n'a plus besoin d'une visite toutes les 600 heures mais seulement toutes les 900 heures de vol, ce qui améliore considérablement leur disponibilité.

Les forces armées et les industriels s'accordent sur le besoin de réintroduire une responsabilité d'intégrateur face à la trop grande dilution des responsabilités. L'exemple souvent cité est celui de l'hélicoptère Tigre qui a 40 contrats d'entretien avec des acteurs différents. Nous plaidons pour des contrats verticaux de soutien, qui englobent les réparations, les grandes visites et la mise à disposition des pièces. Nous espérons bientôt contractualiser deux contrats de ce type, pour le soutien du Tigre et des Superpuma de l'armée française (Cougar/Caracal). Il s'agit de fixer des objectifs clairs et d'engager l'industrie sur des prix fermes. C'est possible puisque nous le faisons dans le civil et dans le militaire en Australie pour garantir la disponibilité du Tigre ou aux Etats-Unis pour les Lakota de l'US Army.

Quelles sont les priorités d'Airbus Helicopters cette année ?

Obtenir la certification du H160 d'ici la fin de l'année pour des premières livraisons en 2020. Nous avons eu nos 15 premières commandes en 2018 et en attendons autant cette année en vue d'une montée en cadence progressive. Mais nous aimerions aussi raccourcir le calendrier prévu pour le développement de sa version militaire sur laquelle nous travaillons depuis deux ans au titre d'une étude de levée de risques avec les Armées et la Direction générale de l'armement. Nous pensons que le calendrier peut être optimisé de deux ans, c'est l'objet de la visite et des annonces de Florence Parly lundi. Avec un contrat de développement en 2021, les livraisons qui démarreraient en 2026 au lieu de 2028 comme actuellement prévu dans la Loi de programmation militaire.

Pourquoi un tel empressement ?

Nous pensons que le futur hélicoptère interarmées léger (HIL) répond à un réel besoin des forces et qu'en accélérant la livraison de cet appareil destiné à remplacer cinq modèles différents, chacun sera gagnant. Les Armées d'un côté, avec un appareil plus rapide, polyvalent, furtif et moins cher à entretenir et nous de l'autre, en nous permettant d'attaquer le marché export avec la force de la référence « armée française ». Selon nous, le besoin estimé pour un tel type d'appareil entre 2025 et 2030 serait de 400 hélicoptères en version militaire et autant en version civile.

C'est un gros enjeu pour sécuriser notre activité industrielle dans les prochaines années. Rappelons qu'Airbus a consacré plus d'un milliard d'euros d'investissements sur l'hélicoptère H160. Le programme HIL, c'est 2.000 emplois sécurisés chez Airbus Helicopters, essentiellement à Marignane. 80 % des fournisseurs du H160 sont installés en France, principalement en région Sud, avec environ 70 % de la valeur ajoutée du H160.

Votre programme est 100 % français, n'est ce pas anachronique à l'heure de la coopération européenne ?

Ce n'est effectivement pas la coopération européenne qui répond aux enjeux de volume et permet d'amortir l'investissement dans ce nouveau programme militaire d'HIL. C'est la dualité civile et militaire et donc le partage de l'investissement entre l'industriel et l'Etat, avec à terme un investissement équilibré entre les deux parties. Evidemment, on souhaite aussi exporter le HIL vers d'autres pays européens.

La coopération reste cependant dans notre ADN, par exemple avec la modernisation à mi-vie de l'hélicoptère de combat Tigre, qui sera menée avec l'Allemagne et l'Espagne, ou bien encore avec le NH90 européen, qui bénéficiera d'une nouvelle version pour les Forces spéciales. La loi de programmation militaire prévoit aussi la mise au point pour la Marine d'un drone à voilure tournante, le drone VSR700.

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