Barkhane : Paris cherche des hélicoptères de transport lourd pour remplacer les CH-47D Chinook britanniques

28/02/2019

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Que ce soit pour transporter, évacuer ou encore ravitailler des troupes, les trois hélicoptères de transport lourd CH-47D Chinook déployés par la Royal Air Force à Gao [Mali] depuis l’été 2018 sont vite devenus indispensables. Y compris pour des missions auxquelles on ne pense pas spontanément.

Ainsi, en décembre, l’État-major des armées a évoqué un autre rôle qu’est capable de tenir le CH-47D Chinook : le ravitaillement en carburant d’autres hélicoptères, via la procédure dite du « kangourou ».

En effet, si cet appareil peut transporter 3,5 à 4 tonnes de fret, il est également en mesure d’emporter près de 2.000 litres de carburant grâce à des bacs souples. Ce qui fait qu’il peut ravitailler d’autres hélicoptères sans qu’il y ait besoin de déployer un plot logistique par voie terrestre.

Quoi qu’il en soit, la mission de la RAF doit normalement se terminer d’ici la fin de cette année. Et, visiblement, les capacités des CH-47D Chinook manqueront à la force française Barkhane. Au point que la ministre des Armées, Florence Parly, a « fait valoir » auprès de Gavin Williamson, son homologue britannique, la « nécessité de prolonger la mise à disposition » de ces trois hélicoptères.

A priori, les appareils déployés à Gao devront être relevés, quoi qu’il arrive. Ne serait-ce que pour une question de maintenance. « C’est assez difficile de soutenir les hélicoptères en Afrique. Je crois que c’est un problème que toutes les armées rencontrent. L’environnement est hostile, la chaleur et la poussière mettent les machines à rude épreuve, et les liaisons techniques entre ici et la Grande-Bretagne sont longues et difficiles », a en effet expliqué le lieutenant-colonel Huw Law, le chef du détachement de la RAF au Mali.

En attendant, Mme Parly fait le tour des pays européens susceptibles de déployer une telle capacité au profit de Barkhane. « Dans un premier temps, a-t-elle confié aux sénateurs de la commission des Affaires étrangères et des Forces armées, le retrait des CH-47D Chinook britanniques « pourrait être compensé par le Danemark, qui se déclare prêt à fournir des hélicoptères de transport de grande capacité. » En l’occurrence, il s’agirait de trois AgustaWestland AW101 sur les 14 que compte la « Flyvevåbnet » [force aérienne royale danoise, ndlr].

« Nous essayons également de convaincre nos partenaires espagnols d’intensifier leur aide, déjà importante, en matière de transport tactique », a aussi ajouté la ministre. Comme le Royaume-Uni, l’Espagne dispose également de CH-47 Chinook, lesquels doivent d’ailleurs être modernisés.

En tout cas, cela montre qu’une capacité en matière de transport par hélicoptère fait défaut aux forces françaises. Et la Loi de programmation militaire en vigueur ne prévoit rien pour y remédier.

Or, l’absence d’une telle capacité est régulièrement regrettée par le Commandement des opérations spéciales [COS]. En octobre, le général Jean-Pierre Bosser, le chef d’état-major de l’armée de Terre [CEMAT], avait renvoyé la balle à son homologue de l’armée de l’Air [qui était le général André Lanata, lors de l’élaboration de la LPM, ndlr].

« Nous n’avons pas cette capacité. Il s’agit d’un choix fait lors de la construction de la loi de programmation militaire. […] La question doit aussi être posée à l’armée de l’Air qui, au cours de la construction de la LPM, avait envisagé de s’équiper d’hélicoptères lourds, qui sont très coûteux et ne sont pas nécessairement compatibles avec le modèle économique d’un pays tel que la France, alors que certains de nos alliés en disposent », avait lâché le CEMAT.

Le successeur du général Lanata, le général Philippe Lavigne, a cependant avancé une possible solution pour pallier à ce manque d’hélicoptères de transport lourd, en regardant vers l’Allemagne, où une procédure a été lancée pour remplacer ses 68 hélicoptères CH-53G « Stallion » de la Bundeswehr [soit par des CH-53K « King Stallion » de Sikorsky, soit par des CH-47F de Boeing, nldr].

« Le domaine des hélicoptères de transport lourd serait propice à la mise en place d’un Évreux [*] inversé avec nos partenaires allemands. Quelques pilotes français pourraient être formés sur des hélicoptères de transport lourd allemands, grâce à un système de location d’heures, au profit de nos théâtres d’opérations », avait avancé le général Lavigne, lors des dernières discussions budgétaires.

Mais on n’en est pas encore là… Et, en attendant, il faut compter sur la disponibilité [et le bon vouloir] des pays qui n’ont pas fait l’impasse sur une telle capacité.

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